Auteurs: Gérard Bédat, Robert Fernier
Les Éditions Cabédita, 2014, Divonne-les-Bains, 208 p.
J’ai lu ce livre avec grand intérêt, souvent avec passion.
Cet ouvrage est très bien présenté, l’iconographie est de qualité, les photographies de l’auteur sont saisissantes.
D’emblée, les causes du déclenchement de la Première Guerre mondiale sont exposées, ceci est fort utile, car il n’est pas toujours facile de comprendre les origines de cette guerre.
Les cartes aident à situer les voyages de Robert Fernier qui se déplaçait souvent et dans des conditions plus que difficiles.
Fort à propos, monsieur Gérard Bédat nous explique le contexte des lettres écrites par le peintre.
On ne peut pas se douter, lorsque l’on admire actuellement un tableau de Robert Fernier, que cet homme a pu traverser de telles épreuves.
Il a accompli son devoir, quel devoir! C’est un véritable miracle qu’il soit sorti vivant de ces affreux carnages.
On a du mal à imaginer, dans le calme de nos foyers, ce que furent ces années de boue, de froid, de chaleur, de souffrances sous les bombardements, les rafales de mitraillettes, les coups de canon, les gaz et autres horreurs.
J’ai retrouvé dans les lettres du peintre l’état d’esprit de mon grand-père, Pierre Grosmaire, (voir mon livre Lettres à deux mains) rédigeant pour les siens, dans l’inconfort absolu et l’urgence, les mots essentiels qui pouvaient être les derniers.
On peut lire, dans ces Carnets de guerre, qu’heureusement l’humour et le détachement permettent au soldat de surmonter les harassements et les abattements profonds.
L’épilogue éclaire sa perception de la guerre. Comme il est touchant cet hommage à Mme Pau, à l’Hôpital auxiliaire numéro 28 de Prades.
En lisant le chapitre intitulé Au soldat qui râlait un soir près de ma tranchée, je vous avoue que j’ai été totalement bouleversé.
Ces quatre pages écrites le 3 mars 1924 sont parmi les plus intenses et douloureuses que j’ai lues sur la Première Guerre mondiale.
Tout est dit en quelques lignes de l’atroce souffrance que l’on ne peut guérir, cette horreur qui a marqué à jamais l’esprit de Robert Fernier.
On imagine tout le travail mental de Robert Fernier pour trouver de nouveau la vie belle et poursuivre sa si grande carrière de peintre.
Dans ce livre, on côtoie les puces, les poux, les punaises, les rats, le froid, la glace, la faim, la soif, l’épuisement, la mort, la brutalité, la sottise de certains gradés ou de certaines personnes et la grandeur de soldats anonymes ou de prisonniers.
Comme il est bon de voir que du côté allemand, se trouvent aussi des êtres de grande qualité.
Bravo à monsieur Bédat pour ce grand livre, pour avoir publié ces textes qui sont notre mémoire.
Fait étonnant, j’ai terminé la lecture de l’ouvrage le 11 novembre 2020 en la ville de Québec sur les bords du Saint-Laurent. C’est là que les lettres de Robert Fernier me sont parvenues. De la boue des tranchées jusqu’au Québec, quel parcours, quel long chemin! Jamais Robert Fernier n’aurait pu penser que, tant d’années plus tard, ses mots venus de la guerre apporteraient encore de la lumière.
Jean-Louis Grosmaire
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